A-4913/2013

Arrêt du 23 octobre 2014

Composition

Pascal Mollard (président du collège),

Michael Beusch, Daniel Riedo, juges,

Cédric Ballenegger, greffier.

Parties

1. A._______ SA,

2. B._______ AG,

3. C._______ AG,

4. D._______ SA,

5. E._______ SA,

6. K._______ AG,

7. L._______ AG,

8. M._______ SA,

9. F._______ GmbH,

10. G._______ AG,

11. H._______ AG,

12. I._______ SA,

13. LE GROUPE TVA J._______,

tous représentés par Me Michel Bussard,

recourants,

contre

Administration fédérale des contributions AFC,

Division principale de la taxe sur la valeur ajoutée,

autorité inférieure.

Objet

Taxe sur la valeur ajoutée (TVA); activités bancaires; versements d'actionnaires; pratiques administratives; forfait bancaire; notion d'intermédiaire; correction de la déduction de l'impôt préalable; périodes fiscales 2010 et 2011.

Faits :

A.

Le Groupe TVA J._______ (ci-après: le groupe recourant ou le groupe) est inscrit comme assujetti TVA dans le registre de l'Administration fédérale des contributions (ci-après: l'AFC ou l'autorité inférieure) depuis le 1er janvier 19--. A._______ SA officie comme représentant de groupe. Pendant la période allant de l'année 2007 à l'année 2011, celui-ci était composé de différentes sociétés, parmi lesquelles les recourantes 1 à 12 qui sont énumérées en tête du présent arrêt (cf. pièce 6 des recourants, en particulier). On relèvera que les recourantes 6, 7 et 8 ont intégré le groupe en 2010 seulement et que les recourantes 10 et 11 l'ont quitté au 1er octobre 2012. La recourante 12 en a fait partie de 2008 à 2010 uniquement.

B.

Durant l'année 2012, le groupe recourant a fait l'objet, à diverses dates, d'un contrôle externe de la part de l'AFC portant sur les années 2007 à 2011. Le 2 octobre 2012, l'AFC a transmis au groupe recourant deux formulaires intitulés "résultat du contrôle". Il en résultait que l'AFC entendait faire valoir une correction d'impôt en sa faveur de Fr. 1'241'421.- à l'égard des années 2007 à 2009 d'une part et de Fr. 2'747'330.- concernant les années 2010 et 2011 d'autre part. Le 10 octobre 2012, le groupe recourant a informé l'AFC qu'il contestait certaines reprises d'impôt et qu'il souhaitait étayer sa position avant qu'une notification d'estimation ne lui fût adressée. Le 24 octobre 2012, le groupe recourant a fait connaître ses arguments plus en détail. Le 22 novembre 2012, l'AFC, persistant dans ses prétentions, lui a adressé deux notifications d'estimation, n° [1], relativement aux années 2007 à 2009, et n° [2], en ce qui concerne les exercices 2010 et 2011. Le groupe recourant a effectué le paiement des montants réclamés, sous réserve de contestation. La présente procédure concerne les années 2010 et 2011 alors que les années 2007 à 2009 sont traitées dans la procédure parallèle A-4917/2013.

C.

Par mémoire du 20 décembre 2012, le groupe recourant a contesté la notification d'estimation n° [2] relative aux années 2010 et 2011. Le 2 juillet 2013, l'AFC a rendu une décision, dénommée décision sur réclamation, par laquelle elle admettait partiellement les griefs du groupe recourant et fixait nouvellement le montant de la correction d'impôt à Fr. 2'579'033.-.

D.

Par acte du 2 septembre 2013, le groupe recourant et les recourantes 1 à 12 (ci-après: les recourants) ont porté l'affaire devant le Tribunal administratif fédéral. Ils concluent principalement à ce qu'une nouvelle décision soit rendue sur la base des calculs qu'ils présentent, ce qui entraînerait une réduction du montant de la correction d'impôt de Fr. 1'396'561.55, et subsidiairement au renvoi du dossier à l'autorité inférieure, le tout sous suite de frais et dépens. Par réponse du 24 octobre 2013, l'AFC a conclu au rejet du recours sous suite de frais et sans octroi de dépens. Le 6 décembre 2013, les recourants ont répliqué et maintenu leurs conclusions. L'AFC a fait de même par duplique du 12 février 2014.

Les autres faits seront repris, en tant que de besoin, dans la partie en droit du présent arrêt.

Droit :

1.

1.1 Le Tribunal administratif fédéral est manifestement compétent ratione materiae pour traiter du recours et celui-ci répond clairement aux conditions légales de forme et de délai (cf. art. 32 s. de la loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal administratif fédéral [LTAF, RS 173.32]; art. 22a al. 1 let. b, 50 al. 1, 52 de la loi fédérale du 20 décembre 1968 sur la procédure administrative [PA, RS 172.021]).

1.2 S'agissant de la compétence fonctionnelle de la Cour de céans, il convient de mentionner un élément particulier. Par courrier du 24 octobre 2012, le groupe recourant a annoncé qu'il contestait le résultat du contrôle opéré par l'AFC (cf. pièce 8.2 des recourants). Il n'avait encore pas reçu de notification d'estimation à ce moment-là. Dès lors, c'est à bon droit que l'AFC a joint à sa notification d'estimation une décision au sens formel, le tout en un unique document, alors même que ce procédé n'est pas conforme à la loi en temps normal (cf. art. 43 al. 1 let. a, 78 al. 5, 82 s. de la loi fédérale du 12 juin 2009 régissant la taxe sur la valeur ajoutée [LTVA, RS 641.20]; ATF 140 II 202; arrêts du Tribunal administratif fédéral A-666/2012 du 28 octobre 2013 consid. 1.2, A-707/2013 du 25 juillet 2013 consid. 4).

1.3 L'AFC a rendu la décision attaquée au seul nom du groupe recourant. Le recours est établi au nom des différentes entités du groupe ayant fait partie de celui-ci durant la période sous revue ainsi qu'au nom du groupe lui-même. Certains membres en sont entre-temps sortis (cf. let. A ci-dessus). A titre principal, le recours concerne l'activité des recourantes 2, 3 et 10. Néanmoins, les membres d'un groupe étant solidairement responsables des dettes d'impôt du groupe (cf. art. 15 al. 1 let. c 1ère demi-phrase LTVA), tous les membres qui sont restés au sein du groupe sont potentiellement touchés par les cas des recourantes 2, 3 et 10. La dernière d'entre elles ne fait plus partie du groupe, mais elle reste concernée étant donné que les membres sortants d'un groupe continuent de répondre des créances qui découlent de leurs propres activités entrepreneuriales (cf. art. 15 al. 1 let. c 2e demi-phrase LTVA). De plus, l'issue de la présente procédure pourrait, en vertu des règles sur le forfait bancaire de groupe, avoir un impact sur la quotité d'impôt préalable déductible par les différents membres pour les années 2010 et 2011, ce qui vaut également pour ceux qui sont depuis lors sortis du groupe (cf. consid. 4.2 ci-dessous; voir également les montants indiqués dans les conclusions et les deux documents rangés sous pièce 34 des recourants). Ainsi, même les recourantes qui ne font plus partie du groupe et qui ne sont pas visées directement par la présente procédure apparaissent concernées par le litige en cours.

Les groupes ne disposent pas de la personnalité morale, en revanche ils sont considérés comme des assujettis selon la loi (cf. art. 13 LTVA). Dès lors, on peut admettre que, en relation avec des problèmes d'assujettissement et de calcul de l'impôt par exemple, le groupe lui-même a qualité pour recourir (pour un cas de recours au nom du groupe, cf. arrêt du Tribunal administratif fédéral A-704/2013 du 28 novembre 2013; pour des cas de recours au nom des entités constitutives seulement, cf. arrêts du Tribunal fédéral 2C_153/2013 du 16 août 2013, 2C_124/2009 du 10 mars 2010).

Toutes les parties à la procédure ont donc un intérêt à son issue (cf. art. 48 al. 1 let. c PA) et, quelle que soit leur nature juridique, la qualité pour recourir doit leur être reconnue.

1.4 Enfin, au sujet des conclusions, il sied de relever la chose suivante. Les recourants concluent principalement à ce que le montant qui leur est réclamé soit réduit de Fr. 1'396'561.55. Toutefois, selon un autre calcul, le montant de la correction serait de Fr. 1'228'264.55 (cf. les montants indiqués dans les conclusions et les deux documents rangés sous pièce 34 des recourants). Les chiffres fondant ce second calcul ne paraissent pas avoir été modifiés de manière cohérente à la suite des amendements apportés par l'autorité inférieure à ses prétentions dans sa décision sur réclamation (seul le montant relatif à la recourante 2 a été adapté par rapport aux conclusions prises dans la réclamation, alors que les prétentions de l'AFC à l'égard des autres membres du groupe ont également été revues pour tenir compte des effets du forfait bancaire de groupe; cf. pièce 3 des pièces de la réclamation). Le premier chiffre mentionné, soit Fr. 1'396'561.55 paraît donc plus correct. Quoi qu'il en soit, vu l'issue du litige, la question peut rester ouverte.

Il y a ainsi lieu d'entrer en matière.

2.

Le présent litige concerne au premier chef les recourantes 2, 3 et 10. Les problèmes qui se posent par rapport à elles étant à chaque fois différents, il convient d'examiner leurs cas l'un après l'autre. On commencera donc par la recourante 2 (cf. consid. 3 ci-dessous), avant de poursuivre avec la recourante 3 (cf. consid. 4 ci-dessous) et de terminer avec la recourante 10 (recourante 7 dans l'affaire parallèle A-4917/2013; cf. consid. 5 ci-dessous). Ceci fait, il restera à examiner les conséquences globales des conclusions auxquelles sera parvenue la Cour de céans pour chaque cas (cf. consid. 6 ci-dessous).

3. Concernant la recourante 2

3.1 A l'égard de la recourante 2, l'autorité inférieure a procédé à une reprise d'impôt liée à une problématique d'acquisition de prestations de services à l'étranger. On présentera donc ci-après les règles applicables à ce sujet, soit en particulier le fondement général de l'impôt sur les acquisitions (cf. consid. 3.2 ci-dessous), la définition d'une opération en matière de TVA (cf. consid. 3.3 ci-dessous) et la nature de la contre-prestation, spécialement dans le cadre de l'assainissement d'une entreprise (cf. consid. 3.4 ci-dessous). Il conviendra finalement de voir comment se présente le cas particulier de la recourante 2 (cf. consid. 3.5 ci-dessous).

3.2

3.2.1 Selon l'art. 45 al. 1 let. a LTVA, les prestations de services d'entreprises qui ont leur siège à l'étranger et ne sont pas inscrites au registre des assujettis sont soumises à l'impôt sur les acquisitions si le lieu de la prestation se trouve sur le territoire suisse au sens de l'art. 8 al. 1 LTVA. Corrélativement, selon l'art. 45 al. 2 LTVA, le destinataire des prestations visées à l'al. 1 qui se trouve sur le territoire suisse est assujetti à l'impôt sur les acquisitions si, entre autres, il est lui-même assujetti en vertu de l'art. 10 LTVA, autrement dit, s'il est assujetti à l'impôt sur les opérations effectuées en Suisse ("reverse charge"; cf. ATF 139 II 346 consid. 7.1; arrêt du Tribunal administratif fédéral A-3206/2011 du 2 octobre 2012 consid. 2.3.5).

3.2.2 L'art. 8 al. 1 LTVA traite du lieu de la prestation de services. De manière générale, celui-ci se définit comme le lieu où le destinataire de la prestation a le siège de son activité économique ou l'établissement stable pour lequel la prestation de services est fournie ou, à défaut d'un tel siège ou d'un tel établissement stable, le lieu où il séjourne habituellement (art. 8 al. 1 in fine LTVA). Certains types de prestations de services sont ensuite soumis à une réglementation particulière, conformément à l'art. 8 al. 2 LTVA, lequel ne mérite toutefois pas d'être examiné plus avant ici.

3.3

3.3.1 L'impôt sur les acquisitions suppose, comme son nom l'indique, qu'une prestation fournie par une entreprise étrangère soit "acquise" par son destinataire. Autrement dit, elle doit être effectuée à titre onéreux. L'art. 5 let. d de l'ancienne loi fédérale du 2 septembre 1999 régissant la taxe sur la valeur ajoutée (LTVA; RS 641.20) parlait ainsi, de manière pléonastique, de "l'acquistion à titre onéreux" de prestations de services d'entreprises ayant leur siège à l'étranger. Le pléonasme a été supprimé dans le nouveau droit (cf. art. 1 al. 2 let. b LTVA), mais le principe demeure. Ainsi, une transaction est effectuée à titre onéreux, soit contre rémunération, s'il y a échange d'une prestation et d'une contre-prestation - entre lesquelles doit exister un rapport économique étroit - entre un ou plusieurs prestataires et un ou plusieurs bénéficiaires (cf. arrêt du Tribunal administratif fédéral A 5805/2011 du 18 novembre 2013 consid. 2.2).

3.3.2 L'existence d'un lien économique entre la prestation et la contre-prestation est indispensable, de même qu'un rapport causal direct entre les deux, en ce sens que c'est la première qui déclenche la seconde (cf. ATF 138 II 239 consid. 3.2, 132 II 353 consid. 4.1; arrêts du Tribunal fédéral 2C_732/2010 du 28 juin 2012 consid. 3, 2C_129/2012 du 15 juin 2012 consid. 4.1; arrêts du Tribunal administratif fédéral A-5805/2011 du 18 novembre 2013 consid. 2.2.1, A-4695/2010 du 14 janvier 2013 consid. 2.1.2). Tel est le cas, en principe, lorsque l'échange repose sur un contrat. Les critères du droit civil ne sont toutefois pas décisifs et la conclusion du contrat n'est pas une condition sine qua non pour qu'un tel lien existe (ATF 126 II 249 consid. 4a; arrêt du Tribunal fédéral 2A.330/2002 du 1er avril 2004 consid. 3.2). Il s'agit avant tout d'apprécier sous un angle économique si la contre-prestation se trouve, de fait, en relation de cause à effet avec la prestation. A cet égard, le point de vue du destinataire est déterminant, conformément au caractère d'impôt sur la consommation de la TVA (cf. arrêts du Tribunal administratif fédéral A 201/2012 du 20 février 2013 consid. 3.3.3, A-6312/2010 du 10 novembre 2011 consid. 2.1.2).

3.3.3 L'échange de prestations suppose quant à lui que plusieurs sujets participent à l'opération (fournisseur et destinataire de la prestation), respectivement que la prestation fournie quitte la sphère commerciale de son auteur. Un chiffre d'affaires purement interne ne relève pas de la TVA. Toutefois, les différents participants peuvent faire partie d'un même groupe de sociétés (cf. arrêts du Tribunal fédéral 2C_904/2008 du 22 décembre 2009 consid. 7.1, 2C_195/2007 du 8 janvier 2008 consid. 2.1; arrêts du Tribunal administratif fédéral A-5805/2011 du 18 novembre 2013 consid. 2.2.2, A-201/2012 du 20 février 2013 consid. 3.3.1).

3.4.1 Les prestations effectuées entre une société et ses membres sont imposables selon les règles générales de la TVA. Tel est le cas s'il y a un échange de prestations. En revanche, en présence de prestations effectuées par les associés en faveur de la société sans que ceux-ci soient rémunérés en échange ou obtiennent une contre-prestation, on se trouve en présence de prestations non imposables. Ainsi, les apports des associés, qui constituent une mesure de financement, servent avant tout à permettre à la société d'exercer son activité. Les mêmes considérations valent en ce qui concerne les autres modes de contribution des associés, tels que le renoncement à des créances ou à des intérêts, les paiement à fonds perdu, etc. Les contributions de ce genre sont versées gratuitement et elles échappent en conséquence au champ d'application de la TVA (cf. ATF 132 II 353 consid. 6.4, 7.1, 7.2, 9.3; arrêt du Tribunal fédéral 2C_229/2008 du 13 octobre 2008 consid. 5.4, 2A.410/2006 du 18 janvier 2007 consid. 5.3; ATAF 2007/39 consid. 3.2, 3.4; arrêts du Tribunal administratif fédéral A-6182/2012 du 27 août 2013 consid. 3.4.1, A-659/2007 du 1er février 2010 consid. 2.2).

3.4.2 Il convient de bien distinguer entre les authentiques mesures d'assainissement, d'une part, qui sont des "non-opérations", et les prestations fournies par les associés ou des tiers en échange d'une contre-prestation de la société, d'autre part. Les premières se présentent uniquement lorsque les apports, les contributions ou les abandons de créance effectués par les associés ou des tiers ont pour seul but d'assainir une entreprise, d'en garantir l'existence ou de lui permettre de reconstituer son capital propre, sans qu'aucune contre-prestation soit attendue en échange. Les secondes peuvent elles aussi prendre la forme d'un flux de capitaux, d'un abandon de créance ou d'une reprise de dette, par exemple, mais elles se trouvent directement en lien, d'un point de vue économique, avec une autre prestation, fournie par la société. Il s'agit alors d'opérations imposables, sous réserve qu'une exception intervienne, par exemple en raison d'une exonération au sens impropre (cf. art. 21 LTVA, respectivement art. 17 et 18 aLTVA; arrêt A-6182/2012 du 27 août 2013 consid. 3.4.2).

3.5

3.5.1 En l'espèce, il s'agit de dire si une série de versements effectués par la recourante 2 en faveur d'une société-fille aux Etats-Unis doivent être soumis à l'impôt sur les acquisitions. Il s'impose en premier lieu de préciser les faits.

3.5.2 X._______ Corp. (ci-après: la société-fille de la recourante 2 ou la société-fille), dont les bureaux sont à ..., est une société de droit américain détenue à 100 % par la recourante 2. Dans le cadre de ses activités au sein du groupe, elle apporte des affaires aux autres entités qui lui sont apparentées, et en particulier à la recourante 3. Dans le but de régler cette situation, la société-fille de la recourante 2 a conclu avec effet au 1er janvier 2002 un contrat dénommé Business Introducing and Revenue Agreement (cf. pièce 16) en relation avec des prestations de services d'apporteurs d'affaires fournies à la recourante 3. Selon ce contrat, la société-fille doit présenter des clients à la recourante 3, en échange de quoi celle-ci s'engage à verser des honoraires correspondant à 30 % des commissions nettes perçues par elle (Revenue Fees). En outre, la recourante 3 doit encore verser d'autres honoraires (Other Fees), destinés à faire profiter la société-fille des revenus additionnels provenant des clients apportés.

Selon les recourants, le mécanisme de calcul des Other Fees n'aurait, dès le départ, jamais été appliqué (recours, ch. 19). Quoi qu'il en soit, le 31 mars 2006, la recourante 2, la recourante 3 et la société-fille ont établi un document intitulé Novation Agreement (pièce 17 des recourants). Selon celui-ci, la recourante 2 s'engage à verser les Other Fees à la société-fille, à compter du 1er janvier 2005, les Revenue Fees demeurant à la charge de la recourante 3. Le 21 février 2007, les parties ont également amendé le Business Introducing and Revenue Agreement et le Novation Agreement en vue d'adapter le montant des Revenue Fees (cf. pièce 35 des recourants).

Les recourants contestent que le contrat de novation du 31 mars 2006 ait jamais été signé ni appliqué par la recourante 2. En revanche, ils indiquent que la recourante 2 a procédé à des versements à fonds perdus, à titre de contributions d'actionnaires, lorsque les revenus de X._______ Corp. n'étaient pas suffisants pour assurer sa pérennité selon les exigences légales américaines. On relèvera que, précédemment, la recourante 3 paraît avoir agi de la même façon, alors que le capital de la société-fille était entre ses mains et non entre celles de la recourante 2 (cf. recours, ch. 26, 33). Cette situation explique peut-être pourquoi, selon les recourants, les Other Fees n'ont jamais été versés, avant même que la recourante 2 intervienne dans le système de financement.

3.5.3 Les différents contrats produits devant la Cour de céans forment un ensemble un peu incohérent et il est difficile d'en déduire le déroulement exact des événements (par exemple: le contrat produit est valable du 1er janvier 2002 au 31 décembre 2004 seulement; un accord valable dès le 1er janvier 2005 est mentionné dans le rapport annuel 2007 [pièce 8 de l'AFC], mais la Cour n'en dispose pas, s'il existe; de même, selon l'avenant du 21 février 2007, les Revenue Fees ont apparemment été portés au taux de 50 %, mais les recourants ne mentionnent que le taux de 30 %, alors que celui-ci n'était, semble-t-il, plus valable pendant la période litigieuse; l'avenant du 21 février 2007 est produit par trois fois à double, comme s'il s'agissait de deux documents différents).

Il paraît dans tous les cas que le contrat de novation a été signé par une partie au moins, ce qui laisse supposer qu'un accord convenant à toutes les parties avait été trouvé (cf. pièce 17 des recourants). Il est rare qu'une partie signe un document qui, manifestement, a fait l'objet de discussions et de négociations, avant de s'être entendue sur son contenu avec ses contreparties. De plus, il est fait référence aux accords liant la recourante 2, la recourante 3 et la société-fille dans l'avenant du 21 février 2007 (cf. pièce 35 des recourants; pièce 2 de l'autorité inférieure, in fine). Comme, précisément, le contrat de novation du 31 mars 2006 avait pour but d'intégrer la recourante 2 au système, il serait surprenant qu'il soit resté lettre morte. Enfin, l'avenant du 21 février 2007 (du moins une de ses versions; cf. pièce 35 des recourants) est incontestablement signé par toutes les parties. On n'imagine guère que celles-ci aient signé un contrat faisant référence à un accord antérieur qui ne fût pas venu à chef.

Le cas échéant, il est envisageable que le contrat de novation n'ait pas été formellement signé par toutes les parties, mais il a alors assurément été remplacé par un accord oral ou tacite. Les entités concernées font partie d'un même groupe. Il est possible qu'un éventuel accord n'ait pas été mis par écrit, les parties ayant une confiance plus élevée les unes envers les autres qu'à l'égard de simples tiers. On peut de surcroît douter que les responsables de la société-fille aient agi sans avoir l'assurance que, d'une façon ou d'une autre, celle-ci obtiendrait des compensations financières suffisantes pour son activité. Ainsi, les versements litigieux ont eu lieu à plusieurs reprises. Les recourants indiquent eux-mêmes qu'ils auraient passé un "contrat d'apport" s'ils avaient su que le Business Introducing and Revenue Agreement et le Novation Agreement leur poseraient problème en matière fiscale (cf. recours, ch. 187). Il semble à cet égard que les recourants aient une compréhension trop formaliste de la notion d'apport en droit de la TVA. Celle-ci désigne une réalité économique et non une construction juridique (cf. consid. 3.4.2 ci-dessus). Il ne suffit pas qu'un versement prenne la forme d'un apport pour qu'il en soit un au sens de la TVA.

Le fait que les versements n'aient pas été réguliers - il n'y en a, semble-t-il, pas eu en 2011 - ne remet pas en cause cette appréciation (cf. recours, ch. 28, 161 ss; pièce 36 des recourants). En effet, il n'est pas nécessaire qu'un montant fixe et récurrent soit prévu pour qu'il existe un accord entre les parties. Celles-ci peuvent très bien avoir convenu simplement que la recourante 2 épongerait les pertes éventuelles de la société-fille pour que l'accord soit valable et suffisant.

L'échange de courriels produit par les recourants tend à confirmer le point de vue de la Cour (cf. pièces 18, 37 des recourants). Certes, ceux-ci entendent, par ces documents, démontrer que le contrat de novation du 31 mars 2006 n'est jamais entré en vigueur et, effectivement, celui-ci n'est jamais mentionné dans la discussion. Toutefois, la manière sommaire dont la société-fille demande à la recourante 2 d'effectuer un versement substantiel à bref délai et juste avant la fin de l'année implique aux yeux de la Cour que le principe de tels versements était convenu d'avance entre les intéressés. Ainsi, même s'il n'y a peut-être pas eu d'accord écrit à ce sujet, il existait néanmoins un engagement clair de la part de la recourante 2, ce qui est déterminant (cf. consid. 3.3.2 ci-dessus). On imagine mal un actionnaire verser des centaines de milliers de francs à titre de mesure d'assainissement sur la base d'un simple courriel lui indiquant le montant désiré. La recourante 2 était prête à effectuer les versements en question, la société-fille le savait. Contrairement à ce que semble considérer les recourants, les accords oraux, voire tacites, sont valables et reconnus, à tout le moins en droit suisse.

3.5.4 Si l'on considère, comme la Cour de céans l'estime correct, que les versements effectués par la recourante 2 ont eu lieu sur la base d'un accord, quel qu'il soit, ceux-ci sont imposables. Ils résultent d'un contrat et se trouvent donc clairement dans un rapport d'échange avec les prestations fournies par la société-fille à la recourante 3. Le contrat en question procède simplement à un partage de la contre-prestation entre deux débiteurs, d'une part le destinataire direct de la prestation (pour les Revenue Fees payés par la recourante 3) et d'autre part un second débiteur, qui se trouve être le propriétaire de la société-fille (pour les Other Fees ou contre-prestation équivalente payés par la recourante 2). On relèvera que celui-ci ne saurait être assimilé à un simple tiers au sens de l'art. 3 let. f LTVA. La recourante 2 n'intervient pas à la place de la recourante 3. Elle est elle-même partie, en tant que telle, à l'opération TVA litigieuse. Si ce n'est pas elle qui reçoit, concrètement, les prestations effectuées par la société-fille, elle n'en reste pas moins débitrice de sa part de la contre-prestation.

Le fait que les versements de la recourante 2 aient lieu sous forme de contributions d'actionnaire n'a aucune influence, dans la mesure où l'élément déterminant n'est pas la manière dont la contre-prestation se présente d'un point de vue juridique, mais bien l'existence d'un rapport économique direct. Or ce rapport existe certainement ici.

De plus, s'agissant de prestations d'apport de clients (cf. consid. 3.5.2 ci-dessus), celles-ci sont indéniablement soumises au principe général du lieu du destinataire, aucune des exceptions de l'art. 8 al. 2 LTVA n'étant réalisée (cf. consid. 3.2.2 ci-dessus). Ainsi, puisque les prestations litigieuses ont été fournies à la recourante 3 et que celle-ci se trouve à Zurich, elles ont eu lieu en Suisse au sens de la LTVA. Enfin, le prestataire étant une entreprise étrangère non soumise à la TVA en Suisse effectuant des prestations en faveur d'un assujetti, les prestations en question sont clairement soumises à l'impôt sur les acquisitions (cf. consid. 3.2.1 ci-dessus).

3.5.5 Si même on considérait qu'il n'y a pas eu de contrat au sens du droit civil, le résultat ne s'en trouverait pas changé. En effet, la TVA est bâtie sur une appréciation économique des faits. Or, comme cela vient d'être exposé, tout indique que les montants versés par la recourante 2 avaient un lien économique avec les prestations fournies par la société-fille. Même en l'absence d'obligation au sens du droit civil, ce lien suffit à justifier la taxation des prestations fournies (cf. consid. 3.3.1 s. ci-dessus).

3.5.6 En 2005, les recourants ont subi un premier contrôle de la part de l'AFC. Les inspecteurs en charge de celui-ci étaient toutefois différents de ceux qui effectuèrent le contrôle de 2012. Ils admirent que les versements de la recourante 2 en faveur de sa société-fille étaient des contributions d'actionnaire et ils ne procédèrent à aucune correction d'impôt de ce chef. Les recourants considèrent que, sur cette base, ils étaient fondés à poursuivre leur pratique et à ne pas imposer les versements de la recourante 2 en faveur de sa société-fille. Ils invoquent le principe de la bonne foi.

Le fait que l'AFC ne procède pas à une correction donnée lors d'un contrôle ne signifie pas encore qu'elle considère le comportement de l'assujetti comme correct ni qu'elle lui donne une quelconque garantie à cet égard. Il découle de l'essence même d'un contrôle périodique, tel que prévu par l'art. 62 aLTVA et, désormais, par l'art. 78 LTVA, que l'autorité fiscale a la possibilité de procéder chaque fois à une nouvelle appréciation de la situation et de corriger d'éventuelles erreurs commises par le passé, respectivement de ne pas les répéter (cf. arrêts du Tribunal administratif fédéral A-3695/2012 du 30 juillet 2013 consid. 7.6.1, A-1107/2008 et A-1108/2008 du 15 juin 2010 consid. 10.1.4; décisions de la Commission fédérale de recours en matière de contributions [ci-après: CRC] du 2 septembre 2002, JAAC 67.21, consid. 6, du 17 juillet 2001, JAAC 66.43, consid. 4c). Le contraire ne vaut que si les contrôleurs établissent eux-mêmes des instructions selon lesquelles l'assujetti doit procéder de telle ou telle façon relativement à l'imposition d'une prestation (cf. arrêts du Tribunal administratif fédéral A-3695/2012 du 30 juillet 2013 consid. 7.6.1, A-1107/2008 et A-1108/2008 du 15 juin 2010 consid. 10.1.4; décision de la CRC du 17 juillet 2001, JAAC 66.43, consid. 4c in fine; sur l'ensemble de la question, Pascal Mollard/Xavier Oberson/Anne Tissot Benedetto, Traité TVA, Bâle 2009, p. 106 ch. 360).

Dès lors, si la méthode suivie par les recourants pour l'imposition des contre-prestations versées par la recourante 2 n'a pas été remise en cause par les inspecteurs de l'AFC lors du premier contrôle, cela ne constitue pas un argument suffisant pour renverser le résultat auquel arrive le Tribunal. Par ailleurs, il n'apparaît pas que les recourants aient reçu des instructions les invitant à poursuivre leur pratique à l'issue du premier contrôle (cf. pièce 12 des recourants, in fine; pièce 41 des recourants). Si de telles instructions avaient été données, elles se trouveraient avec les autres directives des inspecteurs dans la fiche de résultat du contrôle, à tout le moins y en aurait-il une trace écrite. Il convient de se montrer strict à cet égard, dans la mesure où l'AFC ne doit pas se retrouver liée trop facilement par les contrôles qu'elle effectue à l'extérieur, faute de quoi la moindre erreur d'appréciation pourrait couvrir une pratique illicite sur plusieurs années. De surcroît, il peut arriver que les assujettis tentent d'influencer l'opinion des inspecteurs lorsque ceux-ci procèdent aux vérifications nécessaires. Ce risque implique de bien distinguer les authentiques directives données à l'assujetti des simples cas de tolérance par rapport à une situation donnée.

3.5.7 Les recourants demandent l'audition des inspecteurs ayant procédé au premier contrôle (cf. recours ch. 146 ss). L'autorité inférieure a déjà invité les inspecteurs à s'exprimer sur le cas et ceux-ci ont confirmé qu'ils avaient eu une discussion au sujet des montants litigieux, lesquels avaient été présentés comme des contributions à la couverture du déficit de la société-fille (cf. décision attaquée, ch. 8.1.2). Autrement dit, ils ont implicitement confirmé qu'ils avaient agi dans le cadre du contrôle et qu'ils avaient entendu, et admis, les arguments des recourants. Or cela ne signifie nullement qu'ils aient donné quelque assurance que ce soit sur le traitement postérieur des versements litigieux. Cette situation paraît parfaitement plausible.

Les instructions sont normalement données par écrit. Les recourants en ont d'ailleurs reçus lors du contrôle de 2005 (cf., par exemple, pièce 12 des recourants, in fine; pièce 41 des recourants). Les instructions figurent, comme à l'habitude, séparément des constatations effectuées durant le contrôle; on trouve ainsi parmi ces dernières les conclusions des inspecteurs au sujet des versements litigieux, ce qui confirme qu'elles n'ont pas valeur d'instructions. Dès lors, on n'imagine guère pourquoi des inspecteurs donneraient des garanties orales sur des contrôles futurs, alors que ce n'est pas leur rôle et qu'ils emploient habituellement la forme écrite. Surtout, il serait absurde que les inspecteurs aient donné des instructions orales uniquement, alors qu'ils mettaient par écrit leurs constatations sur le même sujet. Dès lors, la Cour voit mal ce qu'une convocation de ceux-ci pourrait apporter. Il s'agit plutôt d'un malentendu de la part des recourants, ceux-ci ayant cru que le traitement d'un état de fait lors d'un contrôle, le cas échéant après discussion avec les inspecteurs, leur donnait des garanties pour les contrôles à venir. La Cour renonce ainsi à entendre les témoignages requis par les recourants, par appréciation anticipée des preuves et au vu de la force probante des documents écrits disponibles (cf. ATF 133 II 384 consid. 4.2.3 et les références citées; arrêts du Tribunal administratif fédéral A-5884/2012 du 27 mai 2013 consid. 3.4.1, A-606/2012 du 24 janvier 2013 consid. 1.5.3, A-163/2011 du 1er mai 2012 consid. 2.3, A-1604/2006 du 4 mars 2010 consid. 2.4; André Moser/Michael Beusch/Lorenz Kneubühler, Prozessieren vor dem Bundesverwaltungsgericht, 2e éd., Bâle 2013, ch. 3.144).

Par ailleurs, en ce qui concerne les pièces produites, la Cour constate qu'elles correspondent à celles qui se trouvent habituellement dans les dossiers de TVA. Il n'y a pas de raison de croire qu'il existât ici d'autres pièces que l'AFC eût gardées par devers elle. Le dossier est ainsi complet et les recourants ont eu connaissance de son contenu; leurs réquisitions de production de pièces n'ont plus lieu d'être (cf. recours, ch. 142 ss).

4. Concernant la recourante 3

4.1 En ce qui concerne la recourante 3, le litige porte sur des questions de calcul du forfait bancaire. Il convient donc de résumer le fonctionnement de celui-ci (cf. consid. 4.2 ci-dessous) avant d'examiner la situation dans le cas particulier (cf. consid. 4.3 ci-dessous).

4.2

4.2.1 Sur la base des art. 80 LTVA et 66 de l'ordonnance du 27 novembre 2009 régissant la taxe sur la valeur ajoutée (OTVA; RS 641.201), l'AFC a établi, en concours avec les banques, une méthode de décompte forfaitaire de la TVA (cf. arrêt du Tribunal administratif fédéral A-1882/2013 du 10 février 2014 consid. 2.4.2). Cette méthode est actuellement publiée sous la forme d'une "Info TVA" (cf. AFC, Info TVA 15 concernant le secteur Forfait d'impôt préalable pour les banques, publiée en juillet 2012, remplacée depuis le 1er janvier 2014 par la version internet équivalente de l'application TVA de l'AFC [ci-après: Info TVA 15]; à ce sujet, voir Jacques Pittet, TVA et forfait bancaire: Implications concrètes et perspectives, in: L'Expert-comptable suise [ci-après: ECS] 2008 830). La méthode élaborée par l'AFC permet aux banques de calculer un taux forfaitaire pour le remboursement de l'impôt préalable qu'elles ont acquitté dans le cadre de leurs activités bancaires. Les montants d'impôt préalable qui concernent des opérations extérieures au domaine de la banque sont exclus du forfait et leur remboursement dépend des règles habituelles ("méthode des trois pots"; cf. Info TVA 15, ch. 4).

Le calcul du forfait bancaire se fonde sur la comptabilité de la banque concernée (cf. Info TVA 15, ch. 5.1). Dans un groupe, chaque banque doit l'effectuer de manière séparée (cf. Info TVA 15, ch. 8.2.2.1 ss). Il n'y a pas de taux forfaitaire de groupe.

4.2.2 La comptabilité des banques suisses est soumise à un système comptable uniforme. Selon l'art. 25a de l'ordonnance sur les banques du 17 mai 1972 (OB, RS 952.02), le compte de résultat du bouclement individuel doit contenir au moins les rubriques suivantes (ci-après: le plan comptable):

- 1. Produits et charges de l'activité ordinaire

- 1.1 Résultat des opérations d'intérêts

...

- 1.2 Résultat des opérations de commissions et des prestations de service

- 1.2.1 Produit des commissions sur les opérations de crédit

- 1.2.2 Produit des commissions sur les opérations de négoce de titres et les placements

- 1.2.3 Produit des commissions sur les autres prestations de service

- 1.2.4 Charges de commissions

- 1.2.5 Sous-total résultat des opérations de commissions et des prestations de service

- 1.3 Résultat des opérations de négoce

- 1.4 Autres résultats ordinaires

- 1.4.1 Résultat des aliénations d'immobilisations financières

- 1.4.2 Produit des participations

- 1.4.3 Résultat des immeubles

- 1.4.4 Autres produits ordinaires

- 1.4.5 Autres charges ordinaires

- 1.4.6 Sous-total autres résultats ordinaires

- 1.5 Charges d'exploitation

...

- 1.6 Bénéfice brut

...

4.2.3 Les prescriptions de l'art. 25a OB sont précisées dans une circulaire de l'Autorité fédérale de surveillance des marchés financiers (ci-après: FINMA; cf. Circulaire 2008/2: Comptabilité - banques [ci-après: Circ. FINMA 2008/2], ch. 105 ss.). Cette circulaire a remplacé avec effet au 1er janvier 2009 les Directives de la Commission fédérale des banques (ci-après: CFB) du 14 décembre 1994 sur les dispositions régissant l'établissement des comptes (DEC-CFB), dont le contenu était, en ce qui concerne les éléments à prendre en compte ici, identique. En particulier, on relèvera le contenu des ch. 110 ss de la Circ. FINMA 2008/2, respectivement des ch. 110 ss DEC-CFB:

b) Pos. 1.2 Résultat des opérations de commissions et des prestations de service

Les produits et les charges résultant des opérations ordinaires de prestations de service en général et non seulement les commissions au sens étroit doivent être saisis sous cette rubrique.

aa) Pos. 1.2.1 Produit des commissions sur les opérations de crédit

* Les commissions de mise à disposition, de cautionnement, de confirmation d'accréditifs;

* Les commissions pour conseil.

bb) Pos. 1.2.2 Produit des commissions sur les opérations de négoce de titres et les placements

* Les droits de garde;

* Les courtages;

* Le produit des opérations d'émissions de titres provenant tant des commissions de placement que des prises fermes dans la mesure où la banque ne mentionne pas le produit des opérations du marché primaire sous "Résultat des opérations de négoce". Les banques qui mentionnent le produit des opérations du marché primaire sous "Résultat des opérations de négoce" l'indiquent expressément dans les principes d'évaluation (chiffre 2 de l'annexe);

* Les produits des coupons;

* Les commissions résultant des opérations de gestion de fortune;

* Les commissions sur opérations fiduciaires;

* Les commissions pour conseil en matière de placement;

* Les commissions pour conseil en matière successorale, fiscale et de création de sociétés.

cc) Pos. 1.2.3 Produit des commissions sur les autres prestations de service

* Les droits de location de compartiments de coffres-forts;

* Les commissions du trafic des paiements;

* Le produit de l'encaissement des effets;

* Les commissions d'encaissement documentaires.

dd) Pos. 1.2.4 Charges de commissions

* Les rétrocessions;

* Les droits de garde payés;

* Les courtages payés.

[...]

ee) Pos. 1.2.5 Sous-total résultat des opérations de commissions et des prestations de service

[Pas de commentaire sur ce point]

4.2.4 L'AFC donne encore des précisions par rapport aux directives de la FINMA. Ainsi, dans le résultat des opérations de commissions et des prestations de services, seuls les produits et les charges en relation avec les prestations fournies usuellement par une banque peuvent être pris en compte. N'en font en particulier pas partie, en vertu des instructions de l'AFC, les prestations de services centraux pour entreprises proches, les prestations de management facturées forfaitairement, les prestations de services informatiques (TED) pour tiers indépendants et pour entreprises proches et l'administration d'immeubles pour des tiers. Cette énumération se veut expressément non exhaustive (cf. Info TVA 15 ch. 5.2.3 let. f).

4.3

4.3.1 En l'espèce, les recourants se plaignent d'une correction apportée au calcul du taux forfaitaire applicable à la recourante 3. L'AFC a transféré certains montants relevant initialement de la position 1.2.5 du plan comptable dans la position 1.4.6. Ceux-ci se rapportent à des prestations fournies par la recourante 3 aux autres entités du groupe.

Les prestations en question font l'objet de trois sortes de contrats: les Client Relationship Services Agreements et Business Introducer Agreements (cf. pièce 33 des recourants; pièce 7 des annexes à la réclamation); les Services Level Agreements, (cf. pièce 7 des annexes à la réclamation) et les Bank Support Services Agreements. Seuls ces derniers sont encore litigieux devant la Cour de céans. Ils concernent des services de type suivant (cf. pièce 22 des recourants; pièce 7 des annexes à la réclamation): back office, administration du risque de crédit, gestion du risque, finance et tenue des comptes, gestion des liquidités, gestion de fortune, compliance, conseils juridiques et audit interne.

4.3.2 Fondamentalement, le calcul du forfait bancaire a lieu sur la base de la comptabilité de l'établissement concerné, telle qu'établie selon les règles de la FINMA et contrôlée par celle-ci, même si certaines corrections doivent impérativement être effectuées (cf. Info TVA 15, ch. 5.2 ss; cf. consid. 4.2.4 ci-dessus). Dès lors, la partie qui souhaite s'écarter de cette base doit pouvoir expliquer de manière claire pourquoi celle-ci tombe sous le coup d'une exception. Cette règle doit valoir aussi bien pour les banques que pour l'AFC. Même s'il revient à cette dernière de définir la manière dont se calcule le forfait fiscal (cf. consid. 4.2.1 ci-dessus) et quand bien même elle dispose assurément d'un certain pouvoir d'appréciation pour dire comment celui-ci s'applique, elle doit néanmoins respecter les règles qu'elle a elle-même établies. Or elle a décidé de fonder, en principe, le calcul du forfait sur la comptabilité des banques telle qu'établie en vertu des règle de la FINMA. Elle doit donc être en mesure de justifier de manière solide sa position lorsqu'elle entend appliquer une des exceptions prévues à ce principe. Elle reste naturellement libre de prévoir les exceptions nécessaires dans ses directives sur le calcul du forfait bancaire, puisqu'il lui revient de définir la manière dont s'effectue ce calcul (cf. consid. 4.2.1 ci-dessus). En revanche, elle doit pouvoir justifier pourquoi, dans un cas concret, les conditions de l'exception sont réalisées.

Autrement dit, lorsque l'autorité désire transférer un poste comptable du chiffre 1.2.5 au chiffre 1.4.6 du plan comptable, par exemple, il lui incombe de montrer en quoi les services offerts ne correspondraient pas à ceux qui sont fournis usuellement par une banque (cf. consid. 4.2.4 ci-dessus). A cet égard, la distinction peut être justifiée par différents motifs. Il peut s'agir de services tout à fait autres que ceux qu'une banque fournit habituellement, comme des prestations en matière d'informatique. Il peut aussi arriver qu'une banque effectue de ses prestations habituelles, mais dans une autre configuration que celle qui se présenterait si elle agissait pour elle-même. Tel sera vraisemblablement le cas de prestations en matière de compliance effectuées par une entité d'un groupe en faveur des autres membres de celui-ci. En effet, aucun client ne se rend chez son banquier ni ne le paye spécifiquement pour que celui-ci analyse les risques juridiques que présente sa situation. En revanche, une banque devra examiner ses nouvelles relations pour voir si elles paraissent suspectes. Lorsqu'une entité d'un groupe confie à une autre le soin de mener cette opération, le travail effectué par la seconde sera peut-être le même que celui qui lui incombe pour ses propres clients, mais le cadre contractuel dans lequel il a lieu sera totalement différent. Les coûts et les revenus ne seront pas de même grandeur ni répartis de la même façon que ceux qui résulteraient du travail effectué par une banque pour elle-même. Dès lors, les prestations en question n'apparaîtront pas comme usuelles.

Enfin, la présence d'un ensemble de prestations peut rendre difficile, voire impossible le classement de chacune d'elles dans la bonne catégorie comptable. Dans un tel cas, on fera abstraction de chacune individuellement et l'on se concentrera sur la nature de la prestation globale ou principale pour déterminer le sort de l'ensemble, selon le principe habituel en matière de TVA (cf. art. 19 LTVA; arrêts du Tribunal administratif fédéral A-1266/2013 du 5 novembre 2013 consid. 2.2, A-666/2012 du 28 octobre 2013 consid. 3.5).

4.3.3 L'autorité inférieure n'a pas procédé à une analyse détaillée du contenu des contrats de Bank Support Services. Dans la décision attaquée, elle indique simplement (cf. décision attaquée, ch. 8.2.2): "toutes ces prestations font partie des services centraux fournis à des sociétés liées, qui doivent figurer sous chiffre 1.4.6". Une telle assertion ne suffit pas à justifier une modification de la comptabilité de la banque, celle-ci ne paraissant pas avoir été remise en cause par les autorités de surveillance compétentes. Il convient donc de voir si la Cour de céans peut elle-même étayer, ou contrecarrer, les changements effectués par l'AFC.

Les recourants ne contestent pas que les prestations fournies par la recourante 3 constituent en partie des activités non usuelles qui doivent donner lieu à une correction comptable. Tel est apparemment le cas de la gestion du risque et de l'audit interne (cf. ch. 14.12 du mémoire de réclamation). Quoi qu'il en soit, sur la base du mémoire de recours, le Tribunal n'est pas en mesure de déterminer quelles sont exactement les prestations sur lesquelles porte le litige. La position des recourants ne contient pas d'explications très précises (cf. recours, ch. 60 ss, 69 ss, 213 ss; cf. également les correspondances échangées avec l'AFC, pièce 8.2 des recourants, p. 6). Toutefois, on a vu qu'il revenait à l'autorité inférieure d'expliquer et justifier les changements qu'elle entend apporter à la comptabilité de la recourante 3 (cf. consid. 4.3.2 ci-dessus). Dans la mesure où elle ne l'a pas fait, on ne saurait reprocher aux recourants de ne pas développer une contre-argumentation plus étendue.

4.3.4 Si l'on reprend les différents services offerts dans le cadre des contrats litigieux, force est de constater que ceux-ci sont très variés (cf. consid. 4.3.1 ci-dessus): back office, administration du risque de crédit, gestion du risque, finance et tenue des comptes, gestion des liquidités, gestion de fortune, compliance, conseils juridiques et audit interne. L'une des problématiques évoquées ci-dessus apparaît donc d'emblée (cf. consid. 4.3.2 ci-dessus): est-il possible d'analyser chacune de ces prestations pour elle-même, ou le principe de l'unité de la prestation doit-il prévaloir? La réponse à cette question dépend des circonstances. En l'occurrence, il semble, à la lecture du contrat et au vu des calculs effectués par les recourants (cf. pièces 19, 20, 22 des recourants), que chacun de ces services donne lieu à des commissions comptées individuellement et qu'il soit possible de déterminer précisément quel revenu correspond à quel type de prestations, si bien qu'une analyse détaillée paraît envisageable. Néanmoins, au vu de la brièveté de la motivation, on peut se demander si l'autorité inférieure n'a pas précisément adopté une position schématique en estimant que les prestations fournies sur la base des contrats de Bank Support Services devaient être pris comme un ensemble indivisible. En l'absence d'explications claires et de prises de position étayées de la part des parties, la Cour de céans n'est pas en mesure de se faire une opinion définitive sur ce point.

Si l'on retient que chaque type de prestations peut être analysé pour lui-même, on remarque que certaines ne paraissent pas si éloignées d'une activité bancaire usuelle. Lorsque l'autorité retient dans la liste des services qui ne correspondent pas à une activité bancaire usuelle la gestion de liquidités et la gestion de fortune, l'absence de justification paraît surprenante. La gestion de fortune fait précisément partie des opérations qui relèvent du sous-total 1.2.5 selon la FINMA (cf. consid. 4.2.3 ci-dessus). Il se peut que, ici, l'activité soit exercée d'une manière qui ne correspond pas à celle qui prévaudrait dans le cadre d'une relation bancaire ordinaire (cf. troisième question ci-dessus), mais la raison n'en tombe pas sous le sens.

4.3.5 Il n'est pas possible de dire à ce stade dans quelle mesure exacte les prestations de la recourante 3 doivent être considérées comme des prestations qui ne font pas usuellement partie des prestations fournies par une banque. La Cour de céans ne dispose pas des éléments ni des points de comparaison nécessaires pour trancher cet aspect du litige. Il ne convient pas non plus qu'elle procède elle-même aux investigations utiles, n'étant pas la mieux placée pour ce faire (cf. art. 61 al. 1 PA; arrêts du Tribunal administratif fédéral A-6691/2012 du 23 juillet 2014 consid. 1.2.3, A-4677/2010 du 12 mai 2011 consid. 1.3). Les recourants se verraient par ailleurs privés d'un double contrôle des faits, l'autorité inférieure n'ayant pas cherché, apparemment, à mener une enquête plus approfondie sur les prestations fournies par la recourante 3. Enfin, il revient en premier lieu à l'AFC, en tant qu'autorité chargée d'établir les règles du forfait bancaire, d'évaluer dans quelle mesure celles-ci sont respectées ou non, pour autant que cette évaluation soit faite de manière correcte et compréhensible. L'AFC devra donc compléter l'instruction sur ce point afin de fonder sa décision sur une motivation plus substantielle et plus différenciée après qu'elle aura pris en compte les éléments mentionnés ci-dessus. Ainsi, il convient d'admettre le recours en ce qu'il concerne la recourante 3 et de renvoyer le dossier à l'autorité inférieure pour complément d'instruction et nouvelle décision.

5. Concernant la recourante 10

5.1 La recourante 10 est touchée par des corrections de deux genres bien distincts. D'une part, celles-ci concernent la notion d'intermédiaire dans le domaine financier (cf. consid. 5.2 ci-dessous); d'autre part, elles portent sur les méthodes de calcul admissibles en matière de correction de la déduction de l'impôt préalable (cf. consid. 5.3 ci-dessous).

5.2 Sur l'activité d'intermédiaire

5.2.1 En vertu de l'art. 1 al. 1 LTVA, la Confédération perçoit à chaque stade du processus de production et de distribution un impôt général à la consommation (taxe sur la valeur ajoutée, TVA) avec déduction de l'impôt préalable. Malgré son caractère général, l'impôt est soumis à un certain nombre d'exceptions. Celles-ci sont en particulier réglées à l'art. 21 LTVA, qui "exclut du champ de l'impôt", c'est-à-dire, en termes techniques, exonère au sens impropre, une certain nombre de prestations. De manière concomitante, la déduction de l'impôt préalable relatif aux prestations ainsi exonérées est également exclue (art. 29 al. 1LTVA). L'impôt préalable devient ainsi un facteur de coût pour les prestataires; c'est le phénomène dit de la "taxe occulte" (cf. Daniel Riedo, Vom Wesen der Mehrwertsteuer als allgemeine Verbrauchsteuer und von den entsprechenden Wirkungen auf das schweizerische Recht, Berne 1999, p. 77). Les exonérations (improprement dites) de ce genre sont donc critiquées par la majorité de la doctrine, raisonnement que tient aussi le Tribunal fédéral (cf. ATF 124 II 193 consid. 5e et les références citées). Il se justifie ainsi d'interpréter les dispositions concernées de manière plutôt restrictive, même s'il faut d'abord chercher à en trouver le sens véritable (ATF 124 II 193 consid. 5e; arrêt du Tribunal fédéral 2C_11/2008 du 16 mai 2008 consid. 2.4; 2C_613/2007 du 15 août 2008 consid. 2.2; arrêts du Tribunal administratif fédéral A-6436/2011 du 18 septembre 2013 consid. 3.2.2, A 2276/2012 du 29 octobre 2013 consid. 2.4.1).

5.2.2 Une série d'opérations réalisées dans les domaines du marché monétaire et du marché des capitaux sont exclues du champ de l'impôt (c'est-à-dire exonérées au sens impropres) sur la base de l'art. 21 al. 2 ch. 19 LTVA. En ce qui concerne ses let. a à e, cette norme a rigoureusement la même teneur que celle qui avait cours sous l'ancien droit (cf. art. 18 ch. 19 let. a à e aLTVA). On peut constater à lecture des ces dispositions que, à chaque fois, l'exonération vaut également pour les opérations de "négociation". Toutefois, la loi ne définit pas plus précisément le sens de ce terme.

5.2.3 Sous l'ancien droit, l'activité d'intermédiaire (par quoi il faut entendre l'activité de négociation) était définie dans la Brochure 14, valable formellement du 1er octobre 2009 au 31 décembre 2009, mais qui n'a été remplacée par une nouvelle publication qu'en avril 2012. L'ancienne pratique était fondée sur l'idée qu'un assujetti ne peut prétendre à la qualité d'intermédiaire que s'il agit expressément au nom et pour le compte d'une partie à une opération financière exonérée, conformément aux anciennes règles sur la représentation directe (art. 11 al. 1 aLTVA).

5.2.4 Cette pratique a été confirmée une première fois par le Tribunal fédéral durant l'année 2008. Celui-ci s'est à cette occasion livré à une analyse de la pratique européenne et du droit suisse. Il faut noter à cet égard que l'ancienne législation sur la TVA employait de manière indistincte, en allemand, le terme de Vermittlung ou Vermittler (en italien: mediazione ou mediatore) dans le cadre des règles sur la représentation directe, d'une part, et en lien avec la négociation de produits financiers, d'autre part. Par contre, en français, la loi distinguait l'activité d'intermédiaire en lien avec les règles sur la représentation et la négociation en matière financière; les termes étaient ainsi différents. Certes sans s'attarder sur les divergences lexicales existant entre les langues, le Tribunal fédéral avait retenu que le législateur avait sciemment défini la notion de "Vermittlung" de manière plus étroite en droit de la TVA qu'en droit civil. Seule entrait en ligne de compte une activité dans laquelle le représentant agissait expressément au nom et pour le compte du représenté. Ce n'était que dans un tel cas qu'il était possible de parler de "Vermittlung". Sur la base des travaux préparatoires et des autres critères d'interprétation, il n'existait aucune raison de considérer que le terme de "Vermittlung" eût un autre sens dans le cadre des exonérations au sens impropre que celui qui lui était attribué en lien avec la problématique de la représentation. Cette solution se justifiait également parce que les exonérations au sens impropres doivent s'interpréter de manière "restrictive" (cf. arrêt du Tribunal fédéral 2C_686/2007 du 19 mai 2008 consid. 2.3.4; cf. consid. 5.2.1 ci-dessus).

La jurisprudence en question a été confirmée récemment par le Tribunal fédéral, en relation toujours avec l'ancien droit (cf. arrêt du Tribunal fédéral 2C_979/2011 du 12 juin 2012 consid. 4, traduction à la Revue de droit administratif et fiscal [ci-après: RDAF] 2012 II 472).

5.2.5 L'Info TVA 14 concernant le secteur Finance (valable à partir du 1er janvier 2010, mais publiée en avril 2012, et remplacée depuis le 1er janvier 2014 par la version internet de l'application TVA de l'AFC, au contenu équivalent) décrit ainsi l'activité d'intermédiaire:

L'activité d'intermédiaire pour les prestations mentionnées à l'art. 21, al. 2, ch. 19, let. a à e, LTVA est définie comme l'activité d'une personne agissant comme entremetteur et ayant comme but de parvenir à la conclusion d'un contrat entre deux parties dans le domaine du marché monétaire et du marché des capitaux, sans qu'elle-même soit partie au contrat en question et sans qu'elle n'ait un intérêt propre au contenu dudit contrat. L'activité d'intermédiaire doit être exercée au titre d'activité distincte d'entremise. Elle est différente des prestations contractuelles typiques fournies par les parties prenantes à de tels contrats et doit porter sur des opérations commerciales individuelles.

Ainsi, la prestation d'intermédiaire peut-elle entre autres consister à indiquer à l'une des parties contractantes les occasions de conclure un contrat, à entrer en contact avec l'autre partie, et à négocier, au nom et pour le compte du client, les détails des prestations réciproques. La conclusion effective du contrat n'est pas une condition sine qua non. L'intermédiaire réunit donc deux parties et les amène à conclure un contrat, l'importance de sa contribution devant être en adéquation avec le contrat à conclure.

[...]

5.2.6 La nouvelle définition de l'activité d'intermédiaire a été adoptée afin que la pratique suisse se rapproche de celle qui prévaut dans l'Union européenne à la suite de l'arrêt CSC Financial Services Ltd de la Cour de justice (cf. arrêt de la Cour de Justice des Communautés européennes [actuellement, de l'Union européenne] C-235/00 du 13 décembre 2001; confirmé par l'arrêt de la Cour de Justice de l'Union européenne C-259/11 du 5 juillet 2012; cf. également Claus Bohn Jespersen, Intermediation of Insurance and Financial Services in European VAT, Copenhague 2011, p. 157 ss, 198 ss; Oskar Henkow, Financial Activities in European VAT: A Theoretical and Legal Research of the European VAT System and the Actual and Preffered Treatment of Financial Activities, Alphen-sur-le-Rhin 2011, p. 97 ss, 106, 112 s., 124 s., 128 ss).

5.2.7 On constate que l'ancienne pratique suisse se distinguait par une approche très restrictive de la notion de négociation. Plus spécifiquement, un cas de négociation ne pouvait intervenir que dans la mesure où il y avait un rapport de représentation directe. Cette différence de traitement avait expressément été confirmée par le Tribunal fédéral (cf. consid. 5.2.4 ci-dessus). La nouvelle pratique suisse se rapproche fortement de l'interprétation donnée par la Cour de justice de l'Union européenne à la notion de "négociation", puisque celle-ci repose principalement sur le type de prestation fournie (cf. consid. 5.2.6 ci-dessus; cf. Niklaus Honauer/Thomas Patt, Vermittlungsleistungen im Finanzbereich: Änderungen im zweiten Entwurf der MWST-Branchen-Info 14 Finanzbereich, in: ECS 2012 180, p. 180; Niklaus Honauer/Thomas Patt, Vermittlung von Finanztransaktionen: Neudefinition des Vermittlungsbegriffs im Finanzbereich, ECS 2011 217, p. 217 s.). Toutefois, l'analogie n'est peut-être pas parfaite (cf. Alois Camenzind/Niklaus Honauer/Klaus A. Vallender/Marcel R. Jung/Simeon L. Probst, Handbuch zum Mehrwertsteuergesetz, 3e éd., Berne 2012, ch. 1237 s.). De plus, les contours de la nouvelle pratique paraissent vagues. Comme on le verra, il n'est pas nécessaire de chercher à les faire ressortir plus clairement.

5.2.8

5.2.8.1 Selon la jurisprudence, les brochures et autres instructions édictées par l'Administration fédérale constituent des ordonnances administratives indiquant l'interprétation généralement donnée à certaines dispositions légales (ATF 133 II 305 consid. 8.1). En principe, le champ d'application temporel de ces ordonnances concorde avec celui de la norme légale que celles-ci concrétisent (arrêts du Tribunal fédéral 2A.451/1998 du 30 mars 2001, publié in: Archives de droit fiscal suisse [ci-après: ASA] 72 158, consid. 4c, du 15 mai 2000, publié in: ASA 70 589 et RDAF 2000 II 300, consid. 5b s.; ATAF 2007/25 consid. 3.2; arrêts du Tribunal administratif fédéral A-1669/2006 du 3 septembre 2010 consid. 2.2, A 1394/2006 du 21 septembre 2007 consid. 4.2.3). Ainsi, lorsqu'une nouvelle directive de l'administration est introduite, elle est censée valoir à compter de l'entrée en vigueur de la disposition légale dont elle précise le sens (cf. arrêt de la CRC 2003-17 du 1er juin 2004 consid. 5c; Bettina Bärtschi, Die Vorausstetzungen für Praxisänderungen im Steuerrecht, in: Steuerrecht 2008: Best of zsis, édité par Michael Beusch/ISIS, Zurich 2008, p. 104 s.).

5.2.8.2 Une pratique bien établie acquiert un poids certain. Toutefois, il n'est pas défendu aux autorités de la modifier, voire un changement peut s'imposer lorsqu'il s'avère que le droit a été appliqué de manière incorrecte ou qu'une autre interprétation du droit ou une autre utilisation du pouvoir d'appréciation correspondrait mieux au sens de la loi ou à l'évolution des circonstances. En règle générale, un changement de pratique ne se justifie cependant que dans la mesure où la nouvelle solution repose sur une meilleure compréhension de la ratio legis, à un changement du contexte extérieur ou à une évolution dans la conception générale du droit; autrement, la pratique en vigueur doit être conservée (ATF 135 I 79 consid. 3, 132 III 770 consid. 4). De plus, l'intérêt d'une application correcte de la loi doit primer celui de la sécurité du droit (Häfelin/Müller/Uhlmann, op. cit., ch. 513). Un changement de pratique doit dès lors reposer sur des motifs sérieux et objectifs qui doivent être d'autant plus importants que la pratique renversée a été suivie pendant longtemps (ATF 127 I 49 consid. 3c, 126 I 122 consid. 5; Bärtschi, in: Steuerrecht 2008, p. 89 ss).

5.2.8.3 Conformément au principe énoncé plus haut (cf. consid. 5.2.8.1 ci-dessus), un changement de pratique justifié vaut en général immédiatement et pour toutes les procédures pendantes. Ainsi, lors d'un contrôle, l'Administration fédérale accepte généralement d'appliquer une nouvelle pratique favorable au contribuable à des périodes fiscales antérieures à son entrée en vigueur (cf. arrêt du Tribunal fédéral 2C_299/2009 du 28 juin 2010 consid. 3.5; Mollard/Oberson/Tissot Benedetto, op. cit., p. 807 ch. 9). En revanche, lorsque la nouvelle pratique est défavorable à l'assujetti, les circonstances de l'espèce peuvent s'opposer à son application immédiate en raison de la protection dont bénéficie la bonne foi (cf. Bärtschi, in: Steuerrecht 2008, p. 106 ss). Ainsi, selon les cas, la nouvelle pratique ne peut être appliquée qu'après qu'elle a préalablement été annoncée; tel est en particulier le cas en matière de droits de parties dans la procédure (cf. ATF 132 II 153 consid. 5.1; arrêt du Tribunal fédéral 2C_421/2007 du 21 décembre 2007; arrêt du Tribunal administratif fédéral A-4785/2007 du 23 février 2010 consid. 2.3). De même, si un assujetti a déclaré la TVA en respectant la pratique en vigueur et qu'il a payé sans réserve le montant dû, l'administration devra renoncer à lui appliquer une nouvelle pratique défavorable (Mollard/Oberson/Tissot Benedetto, op. cit., p. 808).

La problématique est plus simple en ce qui concerne les précisions de pratique. Celles-ci ne sont que des explications supplémentaires en lien avec une pratique existante qui continue d'être applicable. Elles n'apportent ainsi nul changement, mais uniquement des éclaircissements sur un point qui restait encore vague. La bonne foi des tiers ne saurait donc jouer de rôle, puisque ceux-ci ne pouvaient se fier à aucune information précise. Dès lors, les précisions de pratique sont applicables dans le temps de la même manière que les dispositions qu'elles interprètent ou, le cas échéant, que la pratique qu'elles complètent, sans restriction liée à la protection de la bonne foi (cf. arrêt du Tribunal fédéral du 15 mai 2000, publié in: ASA 70 589 et RDAF 2000 II 300, consid. 5c s.; arrêt du Tribunal administratif fédéral A-1513/2006 du 24 avril 2009 consid. 4.3.2; Mollard/Oberson/Tissot Benedetto, op. cit., p. 808).

5.2.8.4 L'autorité de réclamation ou de recours examine uniquement la conformité de la décision attaquée au droit fédéral et ne se prononce que de manière indirecte sur la validité de la directive en vertu de laquelle cette décision a été prise (cf. ATF 105 Ib 136 consid. 2; Blaise Knapp, Précis de droit administratif, 4e éd., Bâle 1991, ch. 373). Même si elle considère cette directive comme contraire au droit fédéral, elle ne peut l'annuler. En revanche, si le fisc continue de l'appliquer, ses décisions peuvent être cassées en procédure de réclamation ou de recours (cf. Pierre-Louis Manfrini, Nature et effets juridiques des ordonnances administratives, Genève 1978, p. 200 s.; Raymond Spira, le contrôle juridictionnel des ordonnances administratives en droit fédéral des assurances sociales, in: Mélanges André Grisel, édité par Jean-François Aubert/Philippe Bois, Neuchâtel 1983, 803 ss, p. 817; sur tout ce sujet: cf. arrêt du Tribunal fédéral du 15 mai 2000, in: ASA 70 589 et RDAF 2000 II 300, consid. 5b).

5.2.9

5.2.9.1 L'AFC a passablement étendu le champ d'application de la notion d'intermédiaire dans sa nouvelle pratique (cf. consid. 5.2.5 ci-dessus). Comme cela a été mentionné, les autorités sont libres, fondamentalement, de modifier leur pratique lorsqu'il apparaît des motifs fondés de croire que la nouvelle manière de faire correspondra mieux à l'esprit de la loi (cf. consid. 5.2.8.2 ci-dessus). De plus, il est évident que l'adoption d'une nouvelle loi justifie la mise à jour des pratiques en vigueur. Il faut toutefois dans tous les cas que le texte légal soit respecté et une nouvelle pratique n'est admissible que dans le cadre autorisé par la loi (cf. consid. 5.2.8.1 s. ci-dessus). Il sied donc de vérifier que tel est le cas ici.

Le nouveau droit a repris textuellement, à de très rares exceptions près, d'ailleurs non pertinentes en l'occurrence, les exonérations prévues par l'ancien (cf. art. 21 LTVA; art. 18 aLTVA). Il est notoire que cette partie de la loi devait faire l'objet d'une procédure de révision séparée ("partie B"), qui n'a pas abouti à ce jour (cf. Message sur la TVA, FF 2008 6277, p. 6280 ss, 6352). On sait que le législateur a souhaité conserver, dans un premier temps du moins ("partie A"), les exonérations telles qu'elles existaient jusqu'alors (cf. Message sur la TVA, FF 2008 6277, p. 6352). Autrement dit, la nouvelle loi ne justifie pas en elle-même une modification de la pratique de l'AFC sur la notion d'intermédiaire en matière financière (cf. Honauer/Patt, in: ECS 2012 180, p. 184; Honauer/Patt, in: ECS 2011 217, p. 220).

De plus, selon la jurisprudence du Tribunal fédéral (cf. consid. 5.2.4 ci-dessus), la notion de négociation implique que le prestataire de services agisse comme représentant. Certes, cette interprétation a été élaborée sur la base du texte allemand de l'ancien droit, qui ne distinguait pas les termes de négociation (Vermittlung) et d'intermédiaire (Vermittler). Toutefois, la jurisprudence en question ne repose pas uniquement sur une interprétation grammaticale de la loi. Le Tribunal fédéral a considéré qu'elle reflétait l'intention véritable du législateur, que la dichotomie avec le droit européen n'était pas problématique et que sa solution concordait avec le principe selon lequel les exonérations doivent être interprétées de manière stricte (cf. consid. 5.2.1 ci-dessus).

Le Tribunal fédéral n'a pas seulement admis l'ancienne interprétation donnée par l'AFC à la notion de "Vermittlung". Il a considéré qu'elle était la seule possible. Autrement dit, la présence d'une opération de "Vermitt-lung" n'était réalisée que si le "Vermittler" agissait au nom et pour le compte d'une des parties à l'opération financière exonérée selon l'art. 18 ch. 19 aLTVA. Il n'y avait pas de marge d'interprétation (cf. arrêts du Tribunal fédéral 2C_979/2011 du 12 juin 2012 consid. 4, 2C_686/2007 du 19 mai 2008 consid. 2.3.4, 2.4.2). L'art. 21 al. 2 ch. 19 LTVA reprend rigoureusement la même formulation que l'art. 18 ch. 19 aLTVA. Or le législateur n'a pas souhaité modifier la portée des exonérations au sens impropre dans le nouveau droit. Ainsi, non seulement le texte légal est-il resté pareil, mais sa ratio legis n'a pas été modifiée non plus. Dès lors que, selon le Tribunal fédéral, l'interprétation donnée précédemment à la notion d'intermédiaire était la seule possible et que le législateur n'a manifesté aucune intention d'en changer, il s'impose de considérer que cette solution est toujours valable, malgré l'entrée en vigueur de la nouvelle loi.

5.2.9.2 Si l'art. 21 al. 2 ch. 19 LTVA concorde strictement avec son pendant antérieur, tel n'est pas le cas de l'art. 20 LTVA sur la représentation. Or, comme cela a déjà été relevé, l'interprétation de la notion de "Vermittlung" élaborée par le Tribunal fédéral tient en partie à l'art. 11 aLTVA (cf. consid. 5.2.4 ci-dessus). Puisque le même terme se retrouvait, en allemand (et en italien), à l'art. 11 aLTVA et à l'art. 18 ch. 19 aLTVA, il devait avoir le même sens et la notion de "Vermittlung" au sens de négociation (cf. art. 18 ch. 19 aLTVA) devait équivaloir à l'activité d'un "Vermittler" au sens d'intermédiaire (cf. art. 11 al. 1 aLTVA). Il en résultait qu'il n'y avait négociation que s'il y avait aussi représentation.

L'art. 20 LTVA ne fait plus du tout référence aux termes de "Vermittler" ou "Vermittlung". On peut se demander si cela signifie que la "Vermittlung" au sens de négociation n'aurait plus de lien avec l'activité du représentant, appelé précédemment "Vermittler". Certains auteurs le soutiennent et justifient ainsi la nouvelle pratique de l'AFC (Camenzind/Honauer/Vallender/Jung/Probst, op. cit., ch. 1234; Regine Schluckebier, in: MWSTG Kommentar, édité par Felix Geiger/Regine Schluckebier, Zurich 2012 [ci-après: MWSTG Kommentar], ch. 24 ad art. 20 LTVA). Toutefois, les auteurs qui ont pris position avant que cette pratique ne soit connue indiquent toujours que l'activité de "Vermittlung" implique que le prestataire intervienne à titre de représentant direct (cf. Ivo P. Baumgartner/Diego Clavadetscher/Martin Kocher, Vom alten zum neuen Mehrwertsteuergesetz: Einführung in die neue Mehrwertsteuerordnung, Langenthal 2010, § 4 ch. 142).

Le législateur a bien distingué la révision de la LTVA en général de celle qui aurait dû lui emboîter le pas au sujet des exonérations. En attendant qu'elle se réalisât, rien ou presque ne devait changer en ce domaine (cf. consid. 5.2.9.1 ci-dessus; cf. en particulier les remarques de Elisa Antonini-Schenkel/Thomas Patt, Taxe occulte im Bankenbereich - Gibt es einen Ausweg? - Themenvorschläge für die Diskussion im Rahmen des Teils B der MWST-Revision, in: ECS 2010 341, p. 345 s., qui soulignent qu'un changement en matière de TVA financière n'aura effet que dans le cadre de la "partie B" de la révision). Il n'y a en particulier aucune mention, dans le message du Conseil fédéral sur la "partie A", du fait que la notion de négociation dût être étendue, alors que les quelques changements apportés en matière d'exonérations sont spécifiquement relevés (cf. Message sur la TVA, FF 2008 6277, p. 6352 s.). Réciproquement, il n'est dit nulle part que les modifications prévues en matière de représentation dussent avoir une influence sur la notion de négociation en matière financière (cf. Message sur la TVA, FF 2008 6277, p. 6351). Il ne ressort rien non plus des discussions qui ont eu lieu devant le Parlement, alors même que l'art. 20 LTVA a été modifié par rapport au projet du Conseil fédéral (cf. BO 2009 N 323 s., BO 2009 E 421, BO 2009 N 1077). Enfin, les explications de ce dernier au sujet de la "partie B" de la révision montrent certes que l'exonération des prestations financières doit être maintenue, mais en aucun cas qu'elle devrait être étendue. Bien au contraire, une suppression serait préférable, mais elle apparaît impossible à réaliser (cf. Message sur la TVA, FF 2008 6277, p. 6434 s.).

On relèvera également que la jurisprudence du Tribunal fédéral, ou à tout le moins l'ancienne pratique de l'AFC, était déjà connue au moment où la nouvelle loi a été élaborée. Si elle avait existé, la nécessité d'un changement ou d'une adaptation aurait été mentionnée, dans la mesure où l'art. 11 aLTVA était entièrement revu. Or seules les conditions de la représentation directe semblent avoir intéressé le législateur (cf. Message sur la TVA, FF 2008 6277, p. 6351).

Au demeurant, il ne faut pas confondre deux choses. D'une part, si l'on suit l'interprétation du Tribunal fédéral, le législateur a souhaité que la négociation au sens de l'art. 18 ch. 19 aLTVA implique la présence d'un rapport de représentation directe et cette situation ne devrait pas avoir changé avec le nouveau droit. D'autre part, le législateur a cherché à assouplir les critères de la représentation directe, ce qui se traduit par la formulation nouvelle de l'art. 20 LTVA. Indirectement, ce changement aura un effet sur le champ d'application de la notion de négociation, puisque celle-ci s'en trouvera d'autant élargie. Néanmoins, rien n'indique que les deux idées ne doivent rester liées.

Cet argument vaut d'autant plus que les exonérations doivent s'interpréter de manière plutôt restrictive. Aussi ne se justifie-t-il pas d'étendre leur champ d'application si le législateur n'en a pas eu l'intention. Quand bien même il en résulterait une divergence avec le droit européen, ce problème ne suffit pas à justifier un changement de pratique, dans la mesure où celui-ci n'est pas conforme à la ratio legis. Les modifications introduites par le nouveau droit n'entament pas la validité de la jurisprudence du Tribunal fédéral. Le cas échéant, il n'appartient pas à la Cour de céans de remettre celle-ci en cause, ce d'autant plus que le Tribunal fédéral a maintenu son interprétation malgré les critiques et les propositions contraires de la doctrine (cf. arrêt du Tribunal fédéral 2C_979/2011 du 12 juin 2012 consid. 4; Honauer/ Patt, in: ECS 2011 217, p. 217 s.; Antonini-Schenkel/ Patt, in: ECS 2010 341, p. 343; Alois Camenzind/Niklaus Honauer/Klaus A. Vallender, Handbuch zum Mehrwertsteuergesetz [MWSTG], 2e éd., Berne 2003, ch. 809; Philip Robinson/Cristina Oberheid, in: mwst.com: Kommentar zum Bundesgesetz über die Mehrwertsteuer, édité par Diego Clavadetscher/Pierre-Marie Glauser/Gerhard Schafroth, Bâle 2000, ch. 18 ss ad art. 18 ch. 19 aLTVA).

5.2.9.3 Il n'est pas contesté en l'occurrence que les co-contractants de la recourante 10 n'ont pas agi en tant que représentants directs d'une des parties aux opérations financières effectuées (cf. pièces 25, 27, 29, 50 ss des recourants). Puisqu'il s'agit, selon ce qui vient d'être expliqué, d'une condition sine qua non pour la présence d'une prestation de négociation, une telle solution ne peut être retenue ici.

Les prestations litigieuses ne sont pas des prestations de négociation. Elles correspondent plutôt à des prestations d'apport de clientèle, même s'il n'est pas indispensable de les qualifier plus précisément. Le point de vue des recourants ne peut dans tous les cas être suivi. Les mesures d'instruction requises par eux en deviennent ipso facto caduques (cf. recours, conclusions ch. 5).

5.2.9.4 On peut encore se demander quel doit être l'effet d'un changement de pratique dont le fondement n'est pas conforme à la loi. En particulier, on peut se demander si les recourants devraient être protégés dans leur bonne foi au cas où ils auraient agi de manière correcte au regard de la pratique définie par l'AFC.

En l'occurrence, l'effet de la nouvelle pratique à l'égard de la recourante 10 ne peut être que nul. Comme cela a déjà été mentionné, l'Info TVA 14 concernant le secteur Finance a été publiée au mois d'avril 2012. La recourante 10 ne peut donc s'être fiée à son contenu pendant les périodes fiscales 2010 et 2011. Il semble donc que la recourante 10 a plutôt agi par erreur ou mécompréhension et cette situation ne laisse pas place à une problématique de protection de la bonne foi. Vu sous cet angle, il n'y a pas non plus de question liée à l'application rétroactive de la nouvelle pratique aux faits de la cause.

5.2.9.5 En définitive, la décision de l'AFC doit être confirmée en ce qu'elle concerne les contrats d'apport de clients passés par la recourante 10, par substitution de motifs. Il n'y a donc pas lieu de se demander ici si ces contrats répondent à la nouvelle définition de l'activité de négociation donnée par l'AFC, mais uniquement de constater que cette nouvelle définition n'est pas compatible avec la loi et qu'elle ne peut trouver à s'appliquer. Le recours doit donc être rejeté sur ce point. En revanche, le Tribunal n'a pas à prononcer la nullité ou l'invalidité de la pratique de l'AFC en tant que telle (cf. consid. 5.2.8.4 ci-dessus).

5.3 Sur la correction de la déduction de l'impôt préalable

5.3.1 La TVA vise à taxer la consommation finale non entrepreneuriale. Cependant, ce ne sont pas les consommateurs, mais les entrepreneurs fournissant des prestations en échange d'une contre-prestations qui y sont assujettis. Cette manière de faire s'impose pour des motifs pratiques (cf. ATF 123 II 295 consid. 5a). Dès lors, lorsque des prestations frappées de l'impôt sont acquises par un assujetti "dans le cadre de son activité entrepreneuriale", celui-ci peut déduire le montant de l'impôt ainsi payé de sa propre dette à l'égard du fisc ("déduction de l'impôt préalable"; art. 28 al. 1 LTVA). L'expression "dans le cadre de son activité entrepreneuriale" souligne que l'acquisition d'une prestation doit objectivement se trouver en rapport avec l'activité entrepreneuriale de l'assujetti (cf. Schluckbier, in: MWSTG Kommentar, ch. 60 ad art. 10 LTVA). Ainsi, toutes les prestations acquises dans le cadre d'une activité entrepreneuriale donnent droit à la déduction de l'impôt préalable (cf. arrêts du Tribunal administratif fédéral A-5017/2013 du 15 juillet 2014 consid. 2.8.5, A 3149/2012 du 4 janvier 2013 consid. 3).

5.3.2 L'assujetti qui utilise des biens, des parties de biens ou des services en partie hors de son activité entrepreneuriale ou qui, dans le cadre de son activité entrepreneuriale, les utilise à la fois pour des prestations donnant droit à la déduction de l'impôt préalable et pour des prestations n'y donnant pas droit doit corriger le montant de l'impôt préalable en proportion de l'utilisation qui en est faite (art. 30 al. 1LTVA).

La correction peut être opérée en fonction de l'affectation effective, en s'appuyant sur une méthode forfaitaire dont les forfaits ont été fixés par l'AFC ou sur la base de calculs propres (art. 65 OTVA). Si l'assujetti se fonde sur ses propres calculs, il doit justifier en détail les faits sur lesquels se fondent ses calculs et procéder à un contrôle de plausibilité (art. 67 OTVA). L'assujetti peut choisir une ou plusieurs méthodes pour calculer la correction de la déduction de l'impôt préalable, pour autant que cela conduise à un résultat correct (art. 68 al. 1 OTVA). Est considérée comme appropriée toute application d'une ou de plusieurs méthodes qui tient compte du principe de l'économie de la perception, est compréhensible sous l'aspect économique et répartit l'impôt préalable conformément à l'utilisation pour une activité déterminée (art. 68 al. 2 OTVA).

5.3.3 En l'espèce, la recourante 10 fournit apparemment des services financiers sous deux formes. D'une part, elle agit à son propre nom et pour son propre compte; les services qu'elle offre constituent des prestations relevant de l'émission et de la distribution de produits financiers, si bien qu'ils sont exonérés d'impôt au sens impropre. D'autre part, elle agit au nom et pour le compte d'une société apparentée sise à Guernesey, Y._______ Ltd (ci-après: la société de Guernesey), tout en offrant, à ce qu'il semble, des services de nature similaire. En vertu d'un accord passé avec l'administration fiscale zurichoise, la moitié des résultats de la société de Guernesey ont été attribués à la recourante 10. Les prestations à l'origine de ces revenus ont été considérées comme des services imposables dont le lieu se trouve à Guernesey et qui donnent par conséquent droit à la déduction de l'impôt préalable (cf. recours, ch. 111 ss, 270 ss; décision attaquée, ch. 8.3.2).

Le litige porte sur la manière de calculer l'impôt préalable récupérable en vertu de ces prestations. La recourante 10 n'est pas une banque et elle ne peut en conséquence employer le système du forfait d'impôt décrit précédemment (cf. consid. 4.2 ci-dessus; décision attaquée, ch. 8.3.2). Ainsi, elle doit procéder à un décompte exact.

Selon la vision des recourants, le chiffre d'affaires imposable rapatrié de Guernesey devrait être multiplié par 1,5 et mis en relation avec le chiffre d'affaires dégagé par les opérations faites en compte propre pour déterminer le pourcentage d'impôt préalable récupérable (cf. recours, ch. 115 ss, 270 ss; pièces 31, 32 des recourants). Le chiffre d'affaires obtenu avec les produits vendus au nom de société de Guernesey est compté à moitié dans le chef de la recourante 10. Or il s'agit apparemment de produits similaires à ceux qui sont distribués directement par celle-ci. Autrement dit, les charges d'impôt préalable dont ils sont grevés sont plus ou moins équivalentes. Ainsi, la recourante 10 dépense à peu près les mêmes montants pour obtenir 100 de chiffre d'affaires en Suisse et 50 à Guernsey. Proportionnellement, les charges qui grèvent ces 50 de chiffre d'affaires imposables sont donc, grosso modo, doubles. Donc, si l'on veut calculer la part d'impôt préalable affectée à la réalisation d'un chiffre d'affaires imposables, il convient de multiplier celui-ci par un facteur 2 environ. Par précaution, et conscients que leur calcul est approximatif, les recourants proposent d'employer un facteur 1,5 (cf. recours, ch. 267 ss).

L'autorité inférieure a refusé en donnant le motif suivant (cf. décision attaquée, ch. 8.3.2): "[L'AFC] a considéré que l'impôt préalable grevant les charges en relation avec les opérations fournies pour Guernesey devait être traité de manière similaire à la répartition des chiffres d'affaires entre les deux établissements, sans tenir compte d'un coefficient de majoration." Une reprise d'impôt a ainsi été effectuée en prenant comme base de calcul le seul rapport entre le chiffre d'affaires provenant de Suisse et celui obtenu par l'intermédiaire de Guernesey. L'autorité inférieure n'a pas expliqué les motifs pour lesquels elle refusait de prendre en compte le calcul des recourants. De prime abord, leur proposition n'est pas sans fondement. L'assujetti qui doit décompter l'impôt préalable est libre de choisir la méthode employée, pour autant que celle-ci aboutisse à un résultat correct (cf. consid. 5.3.2 ci-dessus). En l'occurrence, si les allégations des recourants correspondent à la réalité, leurs déductions théoriques sont également valables. Comme l'indique l'art. 68 al. 2 OTVA, est considérée comme appropriée toute application d'une ou de plusieurs méthodes qui tient compte du principe de l'économie de la perception, est compréhensible sous l'aspect économique et répartit l'impôt préalable conformément à l'utilisation pour une activité déterminée. La solution proposée par les recourants paraît assez simple et elle aboutit, à première vue, à un résultat plus proche de la réalité que celui auquel parvient l'autorité inférieure.

La Cour ignore tout des éléments de fait à la base de la correction d'impôt litigieuse. Les prestations effectuées n'ont pas été expliquées plus précisément. Les raisons du partage par moitié du chiffre d'affaires de la société de Guernesey entre celle-ci et la recourante 10, décidée dans le cadre des impôts directs semble-t-il, n'ont pas été examinées non plus. La similitude des prestations effectuées par le siège en son nom avec celles qu'il effectuait au nom de la société de Guernesey n'a pas été analysée. L'équivalence des charges grevant ces deux types de prestations n'a été ni infirmée ni confirmée de manière argumentée par l'autorité inférieure, alors que les recourants ont présenté des calculs relativement précis à ce sujet. Le Tribunal ne disposant que de trop vagues informations, soit celles qui sont données ci-dessus, il n'est pas en mesure de se faire une idée sur ces différents points. Dans ces circonstances, il n'est pas en l'état de se faire une opinion propre à ce stade. Etant donné qu'il s'agit de questions liées à l'état de fait, il n'est pas non plus le mieux placé pour établir lui-même les éléments manquants (cf. consid. 4.3.5 ci-dessus). Dès lors, il s'impose d'admettre le recours sur ce point et de renvoyer le dossier à l'autorité inférieure pour complément d'instruction et nouvelle décision.

6.

6.1 En résumé, il convient de rejeter le recours en ce qu'il concerne la recourante 2, de l'admettre et de renvoyer le dossier à l'autorité inférieure pour complément d'instruction et nouvelle décision pour ce qui a trait à la recourante 3, de rejeter le recours par rapport aux prestations d'apport de clients de la recourante 10 et de l'admettre en renvoyant à nouveau le dossier pour complément d'instruction et nouvelle décision à l'égard des prestations fournies par la même en faveur de la société de Guernsey. Ces changements impliquent également que l'autorité inférieure devra recalculer l'impôt préalable déductible par les autres recourantes, dans la mesure où les règles sur le forfait bancaire de groupe (ou l'imposition de groupe) ont pour conséquence que tous les membres sont potentiellement touchés par une modification du taux d'impôt récupérable par l'un d'eux.

L'acquisition de prestations de services par la recourante 2 correspond à un montant de Fr. 329'978.45 (cf. annexe à la décision attaquée, p. 1). Les prestations d'apport de clients fournies à la recourante 10 correspondent à première vue à un montant de Fr. 853'467.25. Néanmoins, pour les raisons susmentionnées, la Cour n'est pas en mesure de calculer précisément le montant dû par les recourants sur cette base. Il appartiendra ainsi à l'autorité inférieure de reprendre globalement ses calculs.

6.2 Selon la jurisprudence, la partie qui a formé recours est réputée avoir obtenu gain de cause lorsque l'affaire est renvoyée à l'administration pour instruction complémentaire et nouvelle décision (ATF 132 V 215 consid. 6.2). En conséquence, conformément à l'art. 63 al. 1 PA et aux art. 1 ss du règlement du 21 février 2008 concernant les frais, dépens et indemnités fixés par le Tribunal administratif fédéral (FITAF, RS 173.320.2), les frais de procédure doivent être mis à la charge des recourants en ce qui concerne la partie du recours qui est rejetée et laissés à la charge du Tribunal pour le surplus. L'AFC ne peut se voir mettre de frais à charge (art. 63 al. 2 PA).

Les recourants ont versé une avance de frais de Fr. 25'000.-. La valeur litigieuse est de Fr. 1'396'561.55 (sous réserve de ce qui a été dit au sujet des conclusions, cf. consid. 1.4 ci-dessus). Le recours est rejeté pour un montant de Fr. 1'183'445.70, selon un calcul approximatif (329'978.45 + 863'467.25). Sur cette base, les frais de procédure à charge des recourants seront fixés à Fr. 21'500.-. Cette somme sera imputée sur l'avance de frais et le solde, par Fr. 3'500.-, leur sera restitué une fois le présent arrêt définitif et exécutoire.

6.3 L'art. 64 al. 1 PA prévoit que l'autorité de recours peut allouer, d'office ou sur requête, à la partie ayant entièrement ou partiellement obtenu gain de cause, une indemnité pour les frais indispensables et relativement élevés qui lui ont été occasionnés (cf. également art. 7 ss FITAF). L'art. 14 al. 2 FITAF indique que le Tribunal fixe les dépens sur la base de l'éventuel décompte remis par la partie concernée. A défaut, il fixe l'indemnité sur la base du dossier.

En l'occurrence, les recourants obtenant partiellement gain de cause, ils ont droit à une indemnité à titre de dépens de la part de l'autorité inférieure. Sur la base de ce qui précède (cf. consid. 6.2 ci-dessus), celle-ci sera arrêtée à Fr. 5'300.-.

Par ces motifs, le Tribunal administratif fédéral prononce :

1.

Le recours est partiellement admis.

2.

Le dossier est renvoyé à l'autorité inférieure pour complément d'instruction et nouvelle décision au sens des considérants.

3.

Pour le surplus, le recours est rejeté.

4.

Les frais judiciaires, par Fr. 21'500.- (vingt et un mille cinq cents francs), sont mis à la charge des recourants et imputés sur l'avance de frais par eux fournie. Le solde de cette avance, soit Fr. 3'500.- (trois mille cinq cents francs), sera restitué à ceux-ci une fois le présent arrêt définitif et exécutoire.

5.

L'autorité inférieure doit verser Fr. 5'300.- (cinq mille trois cents francs) aux recourants à titre de dépens.

6.

Le présent arrêt est adressé :

- aux recourants (Acte judiciaire)

- à l'autorité inférieure (n° de réf. ... ; Acte judiciaire)

L'indication des voies de droit se trouve à la page suivante.

Le président du collège : Pascal Mollard

Le greffier : Cédric Ballenegger

Indication des voies de droit :

La présente décision peut être attaquée devant le Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par la voie du recours en matière de droit public, dans les trente jours qui suivent la notification (art. 82 ss, 90 ss et 100 de la loi fédérale du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral [LTF, RS 173.110]). Le mémoire doit être rédigé dans une langue officielle, indiquer les conclusions, les motifs et les moyens de preuve, et être signé. La décision attaquée et les moyens de preuve doivent être joints au mémoire, pour autant qu'ils soient en mains du recourant (art. 42 LTF).

Expédition :